(Decembre 2000)

- Monsieur Michkevitch, vous etes le doyen de la Faculte des Relations Economiques Exterieures depuis plus de cinq ans. Qu'est-ce qui a change a la faculte?

- La premiere chose qui a ete faite, c'est la modification de l'apparence du bureau du doyen ainsi que celle de toute la faculte. Ce n'est pas le plus important, bien sur, mais tout le monde fait attention a cela. Nous avons fait des travaux, achete de nouveaux meubles et des ordinateurs. Maintenant, c'est un plaisir d'entrer dans le bureau du doyen tant pour les professeurs que pour les etudiants. L'etage que la faculte occupe est bien different des autres. Dans la salle de conferences, ou on a fait installer un nouvel eqiupement, ont lieu regulierement des conferences internationales et republicaines, des cours de langues etrangeres.

Le cycle de formation est passe de quatre a cinq ans, ce qui nous a permis d'elargir le plan d'etudes, d'augmenter le nombre d'heures (surtout pour les langues etrangeres, d'ajouter de nouvelles matieres, de consacrer plus d'attention a l'etude des disciplines specialisees en quatrieme et cinquieme annees.

Le nombre des etudiants a considerablement augmente ces derniers temps. Si autrefois on prenait 20 personnes, aujourd'hui on inscrit 60 personnes et le meme nombre de ceux qui acceptent de payer leurs etudes. Bien que, d'autre part le nombre d'etudiants a baisse a cause du transfert des specialites de Marketing et de l'Administration Municipale a d'autres facultes. Maintenant nous avons seulement une specialite: l'Economie Mondiale et les Relations Economiques Exterieures, ce qui nous permet d'ameliorer sensiblement le travail et d'avoir de bon resultats.

Nous avons egalement introduit le systeme de differenciation des notes, qui prend en consideration non seulement les connaissances presentees a l'examen, mais aussi le travail tout au long du semestre. Il est certain que nous avons eu quelques difficultes a mettre en place ce systeme. Par exemple, il n'a pas ete facile de changer la psychologie des etudiants et des professeurs. Je dois dire qu'aujourd'hui ce systeme est definitivement defini et recommande par le Conseil de l'universite comme exemple pour les autres facultes.

Je voudrais noter encore une innovation qui n'existe dans aucune autre faculte. Il s'agit du classement des etudiants. Chaque etudiant peut desormais connaitre quelle position il occupe dans le groupe parmi les etudiants de sa promotion et dans la faculte. Il n'a pas ete facile de trouver un critere de comparaison. Nous avons arrete notre choix aux resultats des examens, bien que cela ne prenne pas en compte l'activite sociale de nos etudiants. car il est vraiment difficile de l'evaluer.

Certains etudiants auraient prefere le systeme americain ou la note est connue seulement par l'etudiant et le professeur. Moi, j'aime mieux le systeme francais ou l'on affiche les resultats des examens, on peut trouver de longues listes sur les murs. Il n'y a rien d'anormal, au contraire, cela peut stimuler la concurrence entre les etudiants.

A mon arrivee je voulais ameliorer le niveau de la discipline, obtenir une attitude plus serieuse envers les examens et les epreuves. Je pense que le systeme de differenciation de notes encourage cela. Il est agreable de noter qu'on a cree le culte de la connaissance a la faculte, meme si les etudiants paresseux existent encore.

Aujourd'hui on a les meilleurs enseignants de l'universite - intelligents, exigeants, cultives. Beaucoup de matieres sont enseignees par les chefs de chaires.

Les resultats de la filiere francophone font egalement plaisir. On a signe quelques contrats avec l'universite de Paris. C'est deja la deuxieme annee que nos diplomes recoivent parallelement les diplomes de la Sorbonne. Le celebre professeur et economiste Jean-Pierre Helfer nous rend visite chaque annee. J'ai ete frappe par la qualite et l'interet que contiennent ses cours. Il maitrese vraiment son domaine. Je voudrait souligner la contribution de Pierre Cabagnols, le responsable du programme du cote francais, grace a qui des enseignants professionnels viennent chez nous chaque annee. Cette annee nous avons eu l'honneur de recevoir le Recteur de la Sorbonne Michel Kaplan, ce qui confirme encore une fois la reconnaissance de notre travail.

- Quelles sont les difficultes que vous rencontrez dans votre travail?

- A mon avis le plus difficile c'est de surmonter l'inertie des professeurs et celle des structures universitaires, qui considerent les nouveautes comme une atteinte a leur statut. Les gens ne sont pas encore prets ou meme ne veulent pas changer leurs vieilles habitudes. Il a ete assez difficile d'integrer le systeme de differenciation des notes, au debut les etudiants ainsi que les professeurs s'y sont opposes. L'universite est une structure conservatrice. En France, par exemple, la reorganisation du systeme d'education du Moyen Age a commence seulement en 1968, apres de violentes manifestations d'etudiants. Chez nous aussi on ne veut pas de grands changements, on pense que le conservatisme est gage de stabilite. De mon point de vue, on ne peut pas arriver a grand chose si l'on envisage la stabilite comme un bien. Il doit y avoir un facteur destabilisant, destructeur d'anciennes regles, sinon on n'avance pas. On ne peut pas eviter les changements dans la vie de la faculte, ce qui ne plait pas toujours aux conservateurs.

(A ce moment notre conversation est interrompue par le telephone. Le doyen parlait des projets de collaboration pour l'annee prochaine avec un de ses collegues francais, et cela dans un francais parfait.)

-Vous connaissez bien les systemes d'education a l'etranger. Qu'est-ce que vous voulez integrer dans notre faculte?

- Comme je l'ai deja dit, le systeme de differenciation des notes, qui prend en compte le travail pendant le semestre fonctionne deja chez nous. Je voudrais aussi durser par deux la quantite heures de conferences. Nos etudiants ont entre 500 et 600 heures par semestre, tandis qu'a l'etranger, c'est deux fois moins. Mais cela ne veut en aucun cas dire que pendant leur temps libre, les etudiants vont boire de la bierre au restaurant universitaire. Cette reduction comprend l'importance qu'aura le travail individuel. Je crois que ce sont ces connaissances-la qui sont les plus solides.

Je voudrais que les etudiants comprennent que les examens et les epreuves sont des evenement serieux et qu'on ne peut pas ne pas y assister. Les examens a la fin de chaque semestre sont aussi importants que les examens d'entree. En Suisse, en France et dans les autres pays on ne peut pas passer un examen plus de deux fois et seulement pour un temps convenu. Tout le monde a le droit d'etudier mais pour obtenir un diplome on doit subir d'epreuves serieuses. Chez nous, au contraire, le plus difficile est d'entrer a l'universite. Je voudrais egalement renforcer l'esprit de la libre debat qui s'est cree dans notre faculte.

Dans les grandes universites occidentales les etudiants ont la possibilite d'utiliser le courrier electronique et d'avoir un courrier personnel sur le serveur de l'universite. Cette idee me plait bien, ce serait formidable de l'integrer chez nous.

- Les enseignants etrangers nous rendent visite regulierement. Dans quelle direction voulez vous developper de telles relations?

- Oui, nous avons une riche experience de collaboration. Avant nous etions contents de recevoir n'importe quel etranger. Aujourd'hui nous avons le choix, nous essayons donc d'inviter les meilleurs. Nous invitons des Americains, des Allemands et des Francais. Sans aucun doute cela est tres utile. D'abord, en assistant aux cours des enseignants etrangers les etudiants ont la possibilite d'amelorer leur niveau de langue, recevoir des connaissances supplementaires en economie. Et puis cela fait connaitre aux etudiants ainsi qu'aux professeurs de nouvelles methodes d'enseignement.

Nous allons bien sur poursuivre notre collaboration d'autant plus que notre universite est membre de l'Association Europeenne des Universites

- Reconnait-on notre diplome a l'etranger?

- Il y a deux niveaux de renonnaissance du diplome; le niveau formel et nonformel. Le premier est base sur des accords gouvernementaux. Malheureusement, il n'y a pas encore de documents officiels de ce genre. Le dernier comprend la reconnaissance du diplome dans chaque cas concret. Tout depend de la situation concrete. Chaque universite ou entreprise decide par elle-memes. Par exemple aux Etats-Unis d'Amerique quelques universites reconnaissent notre diplome comme 4-5 annees d'etudes universitaires. Dans beaucoup d'universites d'Allemagne, de France on compte les mattieres enseignees. En ce qui concerne l'emploi, dans ce cas tout depend de l'emplyeur en question et du promu, de ses qualites personnelles et professionnelles…

- En ce moment au Belarus il y a quelques dizaines d'universites publiques et privees qui preparent des specialistes en relations exterieures. Rien que l'Universite d'Etat d'Economie de Minsk prepare chaque annee plus de cent specialistes de ce genre. Quelles connaissances et experiences doivent avoir les promus pour tenir la concurrence sur le marche du travail?

- On dit que le but de l'universite est de donner des connaissances concretes, preparer les praticiens. Je ne suis pas totalement d'accord aves ce point de vue. Dans le travail du specialiste il y aura toujours de nouvelles situations. On ne peut pas connaitre les problemes que la vie nous reservera. Le but de l'education est donc plus important: donner aux promus une preparation fondamentale et specialisee. La premiere inclut les matieres telles que la logique, les mathematiques, les langues etrangeres, l'economie, la philosophie, l'ethique, la culture. Il faut aussi preter attention aux matieres directement liees a la specialite telles que l'economie mondiale, les relations economiques exterieures, le management international, l'analyse financiere a l'etranger. Il faut donner aux etudiants une base tres importante de maniere a ce qu'ils puissent appliquer leur savoir dans n'importe quelle situation. Notre tache est d'apprendre a refleshir, a apprendre. Le monde se developpe si vite que les conditions dans lesquelles on doit travailler changent constamment. Je pense que votre generation va apprendre toute sa vie. C'est pourquoi un vrai professionnel doit etre autodidacte.

- La premiere promotion de la fac a eu lieu en 1994. Ou travaillent les promus?

- Nos promus travaillent comme conseillers economiques dans les ambassades du Belarus, a la Banque Nationale, dans les ministeres (des affaires etrangeres, des finances, de l'economie), dans les banques et les compagnies financieres, dans les entreprises-exportatrices, les entreprises mixtes, comme representants des entreprises et des organisations etrangeres. Certains creent leurs propres entreprises. D'autres poursuivent leurs etudes. L'avantage sensible de nos promus c'est la connaissance des langues etrangeres.

- Monsieur Michkevitch, quelles sont selon vous les exigences qu'imposera le marche du travail aux etudiants qui sont actuellement en premiere annee?

- Le professionalisme au plus haut niveau, la connaissance des langues etrangeres et de l'informatique resteront malgre tout. On fera plus attention a la culture generale. Il n'est pas suffisant d'etre un professionel. Il faut etre ouvert et flexible. Il faut savoir se presenter et s'adapter a des situations pas ordinaires. On peut trouver ces qualites chez les specialistes etrangers.

- Et la derniere question est comment voyez-vous la faculte dans cinq ans?

Je projette d'y rester (il rit…) et de continuer a la perfectionner car il n'y a pas de limites a la perfection. Peut-etre de nouvelles specialites vont apparaitront. Si nous reflechissont ensemble a l'honneur de la faculte, dans cinq ans elle sera la plus prestigieuse de notre pays.